Première
plongée dans le travail cinématographique du chilien Alejandro Jodorowsky.
Travail assez bref puisque composé à l’heure actuelle de trois long métrages
sortis entre 1967 et 1973. Par la suite il a travaillé comme scénariste de
bande-dessinés ( l’incal, la caste des méta-barons, etc. ).
El topo est sorti en 1970, Jodorowsky en est le
réalisateur, scénariste, acteur principal.
El topo est une sorte de cow boy solitaire qui se balade en noir, et ses revolvers ne craignent personne. Il sauve une femme qui va le pousser à défier les quatre maîtres du désert. Au bout de cette quête il est censé avoir une révélation métaphysique et devenir le big boss du désert.
C’est ce
qu’on peut vulgairement appelé un film « complètement barré ». Pour
résumé le concept en deux mots c’est un western métaphysique. Métaphysique mais
pas non plus ésotérico-prétentieux ( ici il y a l’ironie voire le grotesque
qui plane ).
Jodorowsky est incroyablement créatif dans les
costumes, les accessoires totalement anachroniques. Et à ça se greffe une
réalisation imaginative, libre et travaillée qui produit des images
fascinantes, hypnotiques, au pouvoir d’évocation puissant. Ainsi se succède la
cruauté, la quiétude, la violence, la compassion, la détresse, la trahison, le
gore, l’humour, l’arrogance, le désir, l’amour, l’exclusion, etc comme autant d’états qui prennent aux tripes.
La plupart des personnages masculins et féminins
sont contradictoires et oscillent entre salaud et victime ( du coup ils
finissent par apparaître ridicules et dégoûtants ), El Topo lui même est
un égoïste violent et vicieux une bonne partie du temps.
De façon générale le mythe de la caverne de Platon
est très présent, mais si les questionnements intellectuels sont multiples, ils
restent des questionnements. Par conséquent chacun peut aller de son
interprétation, ne pas se prendre le chou, et « juste » se laisser
hypnotiser, ressentir.
Le film peut paraître long si le spectateur ne se
prend pas au jeu. La gestion du temps est très loin de la recherche
d’efficacité du cinéma grand public. Ici c’est linéaire et puis ça change
brusquement de style et de ton.
Pour résumer, c’est une expérience riche, esthétique, contemplative, violente que tout le monde n’appréciera pas ( pour citer Jodorowsky : If you are great, El Topo is a great picture. If you are limited, El Topo is limited. ).
C’est le film qui a lancé Jodorowsky et qui lui a permis de tourner La montagne sacrée.